Ce sont les pays consommateurs qui doivent s'adapter, dit le roi d'Arabie
«Nous n'avons rien à voir avec l'actuelle flambée des cours du brut», a-t-il affirmé, répétant que cette flambée était due à la spéculation, à la hausse de la demande dans les économies émergentes et à la taxation des produits pétroliers dans les pays consommateurs. «Ces derniers doivent réduire leurs taxes sur le pétrole [...] s'ils veulent vraiment contribuer à alléger le fardeau du consommateur», a encore dit le roi Abdallah, qui avait réuni le 22 juin en Arabie saoudite les principaux producteurs et consommateurs pour discuter des causes de la flambée des prix. «Quiconque prétend qu'une augmentation de la production atténuera l'acuité de la spéculation actuelle sur le marché se trompe» car «les spéculateurs pensent que les prix vont demeurer élevés», a-t-il ajouté.
L'Agence internationale de l'énergie (AIE) a pourtant répété hier que la spéculation ne devrait pas être désignée comme le «bouc émissaire» de l'envolée des prix du pétrole due, selon elle, au resserrement de l'écart entre l'offre et la demande et à des craintes de pénurie future. «Accuser la spéculation est une solution de facilité», a ajouté l'AIE dans son rapport de perspectives à moyen terme sur le pétrole, présenté hier au XIXe Congrès mondial du pétrole à Madrid. Mais le souverain saoudien a défendu la politique pétrolière de son pays, fondée sur «un prix équitable qui ne nuit ni aux producteurs ni aux consommateurs». «Nous proposons nos produits sur le marché international aux prix en cours, qu'ils soient élevés ou bas», a-t-il dit, ajoutant que «le prix actuel du pétrole est bas si on le compare au prix des énergies alternatives». Le roi Abdallah, dont le pays détient le quart des réserves mondiales de brut, a relevé que «la demande sur le pétrole va augmenter à l'avenir en réponse à la hausse des taux de croissance» économique dans le monde, assurant que la région du Golfe compte «des réserves pétrolières suffisantes pour satisfaire la demande».
Les pays producteurs accusent la spéculation d'être la principale responsable de l'envolée des prix du brut, alors que les pays consommateurs leur demandent d'augmenter leur production pour faire baisser les cours. Leur rencontre à Djeddah avait conseillé des mesures techniques pour tenter de stabiliser le marché pétrolier, mais n'a annoncé aucune nouvelle hausse de la production. Elle a notamment recommandé une meilleure transparence et une plus grande régulation des marchés financiers, ainsi qu'un accroissement des capacités de production et de raffinage afin d'aboutir à un «fonctionnement efficace du marché pétrolier».
À cause des subprimes
Pour le président de l'OPEP, les prix du pétrole flambent à cause de la crise financière américaine provoquée par les subprimes, des biocarburants et des tensions géopolitiques, a estimé hier à Madrid Chakib Khelil, qui enjoint les États-Unis de stabiliser leur monnaie. «Pour moi, [la crise des subprimes] est le facteur principal», a affirmé le président de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP). «Ce n'est pas la crise des subprimes aux États-Unis elle-même» qui a fait exploser les prix du pétrole, mais «ce qui s'est passé ensuite», a-t-il précisé, en citant les baisses de taux ainsi que les injections de liquidités décidées par la Réserve fédérale américaine pour pallier la crise, qui ont débouché sur un affaiblissement du dollar.
Les investisseurs tendent à acheter davantage de pétrole lorsque le dollar baisse, pour se prémunir contre les tensions inflationnistes. En outre, les investisseurs hors zone Euro voient leur pouvoir d'achat renforcé. «Les fonds d'investissement ont également injecté beaucoup d'argent dans les marchés de matières premières, spécialement le marché pétrolier, en l'absence d'alternatives» susceptibles d'attirer des placements, a-t-il développé. «La décision attendue [demain] par la Banque centrale européenne», qui pourrait relever ses taux d'intérêt, pourrait «par conséquent faire monter encore les prix du pétrole», en affaiblissant davantage la valeur du billet vert, a prédit M. Khelil. Appelant les consommateurs à balayer devant leur porte, il a incité les États-Unis à «stabiliser le dollar». «Le second facteur est la situation géopolitique, qui s'aggrave comme vous le savez avec l'Iran», a-t-il poursuivi, tout en soulignant que les prix ne prenaient pas en compte les menaces elles-mêmes mais «la perception» de ces menaces et leur impact potentiel sur la production d'or noir. «Le troisième paramètre, c'est le phénomène des bioéthanols qui ont été introduits à peu près à la même période [que l'éclatement de la crise des subprimes] en août-septembre 2007», a par ailleurs estimé M. Khelil. Selon lui, la production de bioéthanol s'est accompagnée d'une production accrue d'essence (mélangée à l'éthanol), au détriment de la production de diesel, ce qui a contribué à faire grimper les prix du brut.
Libellés : Economie, Moyen-Orient, Pétrole
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