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samedi, juin 21, 2008

La Russie fait profil bas

La Russie, avec son gabarit pétrolier hors norme, a à la fois prodigieusement profité de la spirale des cours du brut et gardé ses distances avec l'OPEP, mais elle risque de se présenter les mains vides à la conférence de Djeddah.Souvent ex-aequo avec l'Arabie saoudite au titre de premier producteur mondial de brut, la Russie a naturellement été conviée à la réunion exceptionnelle des pays producteurs et consommateurs prévue à Djeddah pour discuter de la fièvre des cours du pétrole, qui ont frôlé cette semaine la barre des 140 $US le baril. Mais le ministre de l'Énergie, Sergueï Chmatko, n'a pas l'intention d'honorer l'invitation, et personne n'a encore été désigné pour le remplacer, a-t-on indiqué mercredi à son ministère, sans plus de détails.La Grande-Bretagne, par contraste, doit être représentée à Djeddah par son premier ministre Gordon Brown.

Pourquoi un tel détachement de la part des Russes? Pour des analystes, la Russie est en réalité plutôt embarrassée, car la réunion coïncide avec la confirmation par statistiques interposées que sa production de pétrole se trouve en pleine stagnation, et même en régression depuis le début de l'année.«Pour le moment, la Russie n'a rien à offrir» à Djeddah, résume Chris Weafer, chef économiste de la banque UralSib à Moscou. De son point de vue, «ce n'est pas un bon moment pour s'exposer. [...] Elle préférerait vraiment faire profil bas pendant deux ans pour régler ce problème et revenir ensuite», estime-t-il.Plusieurs responsables de haut rang comme le premier ministre Vladimir Poutine et son vice-premier ministre Igor Setchine se sont relayés ces dernières semaines pour tenter de dissiper l'impression pénible laissée par les récentes statistiques, mais en vain. Ils ont notamment annoncé des mesures fiscales en faveur des groupes pétroliers, destinées à donner un coup de fouet aux investissements notoirement insuffisants dans le secteur en Russie et par conséquent à la production. Mais celles-ci demeurent insuffisantes et n'auront de toute façon aucun effet avant au moins 2009, ont prévenu de grands patrons du secteur pétrolier lors d'une conférence cette semaine à Moscou.

De fait, les experts s'attendent au mieux à une stagnation de la production russe en 2008: elle s'est élevée à presque 10 millions de barils par jour l'an dernier, selon les statistiques de la major BP, c'est-à-dire 12,6 % du total mondial.Le passé mouvementé du secteur des hydrocarbures dans le pays (privatisations douteuses, affaire Ioukos...) a contribué à une vision «court-termiste» de la part de ses dirigeants, malheureusement plus préoccupés de leurs dividendes que d'investissements à long terme, explique un spécialiste étranger sous couvert d'anonymat. Mais même aujourd'hui avec une situation relativement apaisée, accroître la production sera «très difficile», prédit-il.

Autre facteur, «la Russie a toujours été attentive à ne pas être identifiée comme membre du groupe des pays producteurs», et notamment l'OPEP, souligne M. Weafer. Elle «préfère de loin discuter des problèmes d'énergie en tant que membre du G8», dont le prochain sommet se tiendra du 7 au 9 juillet au Japon, juge-t-il.Sans compter que rien ne garantit le succès de Djeddah: «Nous ne prévoyons pas de baisse importante des cours du pétrole» cette année, a confié mardi un haut responsable du groupe Loukoïl, Andreï Gaidamaka. «Je ne parierais pas sur une essence moins chère à la fin de la semaine», ironise pour sa part M. Weafer.

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